PPDA: "La plus ancienne drogue du monde"
"Est-il bien honorable de ne fêter que les morts une fois par an, le lendemain de la Toussaint? Est-il bien sage de ne fêter les amoureux qu'une fois par an, à la Saint-Valentin? L'amour devrait s'entretenir tous les jours, comme un autel d'église avec petites bougies qui jamais ne faibliront.
Puisque nous sommes dans les églises, que vient faire dans cette histoire ce pauvre saint Valentin, prêtre devenu martyr et mort à Rome en l'an 270 après Jésus-Christ? Personne n'a jamais su me répondre. Voilà pourtant cinq ciècles que sa fête est confondue avec celle des amoureux, le 14 février, jour où, disait-on, les oiseaux s'accouplent. Là non plus; aucun ornithologiste n'a pu me le confirmer...
Mais il n'y a pas que par les amoureux que le saint est invoqué. Il sert aussi, dans la tradition paysanne, contre la peste, l'épilepsie et l'évanouissement! Nous y voilà. L'amour est un fléau, quelque part entre la peste et le choléra.
Mais il n'y a pas de vaccin pour s'en prémunir. Il n'est d'ailleurs pas indifférent de remarquer que le seul pape prénommé Valentin-centième pape depuis saint Pierre- ne dura que quarante jours, en 827. C'est donc cela, l'amour: une quarantaine sans fin, qui se transmet de génération en génération, comme une mauvaise grippe, et qu'une personne n'a envie de soigner. L'Amour médecin; disait Molière dans sa comédie-ballet. L'amour sorcier, répondait Manuel de Falla avec son ballet-pantomime.
L'Amour qui serpente interminablement comme le fleuve du même nom, qui serpente et qui s'enroule, qui étouffe et redonne vie tout à la fois. L'Amour qui s'insinue, qui fait du bien et qui fait mal, la plus ancienne drogue du monde.
Et nulle brigade anti-stupéfiants ne réussira jamais à l'éradiquer. Tant mieux.
Bonne fête, les amoureux."
Patrick Poivre D'arvor
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