D-DayNews

03 mars 2006

Syriana


LE SYNDROME de SYRIANA

Ceux qui verront "Syriana" le nouveau film de George Clooney, au sujet d'un agresseur politique dans un royaume du pétrole au Moyen Orient, comprendra la situation fâcheuse globale du pétrole.
Ils verront une histoire noire, impressionnante, qui les laissera méditer. Il n'y a d'Hollywoodien dans ce film, qu'une une brève poursuite de voitures, peu d'explosions, et à peine un vol de balles.

Les spectateurs sentiront plusieurs fois une intense paranoïa, qui semble suggérer que très peu de personnes de l'autorité Américaine sont dignes de confiance, à n'importe quel sujet.
Ils verront également une culture étrangère représentée comme (pour reprendre une expression de Winston Churchill) une énigme.

Dans la scène la plus terrifiante du film, ils verront le personnage de George Clooney, Bob, un agent blanchi de la C.I.A, subissant une "manucure" (en réalité il se fait arracher les ongles des doigts avec une pince), donc pour parler d'un homme sadique d'Al Qaeda.

Mais ils n'auront aucune idée claire à propos des implications des Etats-Unis, faisant tout pour que le Moyen Orient soit dépendant de ceux-ci. En fait, un des résultats malheureux de ce film autrement non stupide, est qu'il approvisionnera, sans doute aucun, le genre d'imaginations paranoïaques qui sont inutiles aux Américains faisant face à un futur ahurissant.
Il est certain qu'il y a davantage de mauvaises foies dans les grandes associations géopolitiques et dans la corporation de la vie, mais la situation fâcheuse globale de l'énergie est avant tout un problème géologique.
En dépit des réclamations de ceux qui croient que la terre a un centre crémeux de nougat de pétrole, l'approvisionnement en cette ressource est réellement fini, et c'est le moment de clore notre brève histoire avec elle. Il y a de bonnes raisons de croire que le monde passe maintenant au-dessus du seuil maximal de la production de pétrole, et commence alors à gravir la terrible dernière pente, celle de l'épuisement irréversible.

En attendant, la découverte de nouvelles énergies sous-terraines a été pratiquement nulle au 21ème siècle, et on ne peut produire ce qui n'a pas été découvert. La scénographie du pétrole reste une grande énigme. Un sujet d'intérêt croissant, arrivé bien tard dans la conscience publique.

Le grand problème n'est donc pas que nous manquions immédiatement de pétrole, parce qu'au fond, on en laissera encore beaucoup. Le problème est que la première moitié était le pétrole brut,le plus léger et le plus doux, dans des endroits faciles d'extension, y compris au Texas. Son obtention et son raffinement étaient bon marché.
L'autre moitié est solide, la plupart du temps lourde. Cette autre moitié est là où les sables sont bitumeux, où les schistes pétrolifères ne se composent pas même de pétrole, mais de précurseurs organiques crus, appelés le kerogen. Ces schistes peuvent être maintenant, seulement, obtenus dans les terres interdites d'Arctique , dans les jungles d'Amazonie, dans les profondeurs sous-marines, ou dans certains pays peu amicaux.
Le pétrole restant est distribué injustement. Plus de deux-tiers appartient aux nations du Moyen-Orient. Mais il ne devient pas bon marché, en termes monétaires ou en coûts géopolitiques.
"Syriana" relate certains de ces coûts géopolitiques.

Le film fut approximativement fondé à partir du palpitant récit de Robert Baer, (2004), "Dormant Avec Le Diable", tiré de sa carrière d' agent de la C.I.A, alors qu'il opérait en Arabie Saoudite. Une grande partie du livre est consacrée à la corruption, à l'avarice, et à l'incompétence extraordinaire de la famille royale d'Al Saud, complotant implacablement pour garder son pétrole, face aux intérêts américains.
Et c'est le contexte le plus précis correspondant au problème auquel nous faisons face, concernant cet épuisement du pétrole.
Nous en Amérique, sommes consternés quand d'autres dans le monde se moquent de notre "torch-bearing" tandis qu'ils font sauter nos soldats, parce qu'ils savent - comme les personnages dans Syriana en connaissent quelque part la profondeur - qu'elle est fondamentale à notre drogue qu'est leur pétrole. Elle serait malheureuse si notre consternation se transformait en colère déchainée, parce que ce genre de fureur politique pourrait tourner au vinaigre .


Jim Kunstler
Traduit de l'anglais par Maxime Plaisantin