D-DayNews

15 avril 2006

Lassalle, victoire personnelle ou symptome d'une démocratie malade?




Le député UDF a enfin terminé sa grève de la faim. Jean Lassalle a quitté sa banquette, dans la salle des Quatre-Colonnes de l'Assemblée nationale, où il s'était installé, depuis le 7 mars. Méthode pour le moins embarrassante pour Jean-Louis Debré en tout cas. Le président de l'Assemblée a exigé du député qu'il soit suivit en permanence par un médecin. Faute de quoi il serait pas autoriser à rester auprès de ses chers confrères. Et comme prévu, il a rejoint l'hôpital Raymond-Poincaré à Garches (Hauts-de-Seine), vendredi matin.
Un départ triomphant bien mérité, car l'élu a obtenu gain de cause sur le maintien de l'unique activité industrielle de son canton béarnais. Il redoutait une «délocalisation à terme» de l'usine Toyal (filiale de Toyo), qui emploie 150 personnes dans dans le bassin industriel de Lacq.
Les plus hautes autorités de l'Etat, du président au Premier ministre en passant par le président de l'Assemblée, par l'incontournable ministre de l'intérieur et par le ministre de l'Industrie (François Loos), ont pris un peu de leur temps pour qu'une solution soit trouvée. Lassalle a gagné après trente-neuf jours de jeûne, mais laisse les responsables politiques, syndicaux et patronaux dans l'embarras.


Jean-Christophe Le Duigou, secrétaire confédéral à la CGT, souligne que "cette affaire montre une chose : l'impuissance du politique. "
D'un autre côté un délégué CGT dans la métallurgie assure que "Lassalle a gagné. Mais après, comment continuer à dire aux copains qu'il faut mettre les pouvoirs publics de notre côté en cas de conflit ? Désormais, les gars vont me dire : Il faut tout casser, puisque les députés eux même montrent qu'ils n'ont aucun pouvoir."
Par ailleurs, le patron d'une PME dénonce un constat pour le moins affligeant: «quand je demande des aides, on me dit qu'il n'y a plus de sous. Quand je demande une réunion à mon préfet avec un responsable du ministère de l'Industrie, c'est tout juste si on ne me rit pas au nez. Je n'ai que 80 salariés, mais ce sont des chômeurs en moins. A un an des élections, je trouve que les politiques jouent un peu avec le feu.»
Ces difficultés politiques ainsi que le mode de règlement des conflits économiques pourraient avoir un effet sur les entreprises étrangères. Vendredi, l'Agence française pour les investissements internationaux (Afii), qui assiste les investisseurs étrangers désireux de s'implanter en France, et qui a participé aux négociations avec Toyal, était «très inquiète des effets de cette affaire sur l'investissement étranger en France et sur celui japonais en particulier».
Le président de l'UDF, François Bayrou, préfère rappeler que son ami Jean Lassalle était "un homme seul face à une multinationale" et qu'il "est un incroyable signe d'espoir, une nouvelle forte pour la France réelle contre la France officielle."

Alors, pour Le-Diguou également, le rapprochement est immédiatement conduit avec le CPE. Le leader centriste estime que "c'est exactement la même chose qui a poussé 2,5 millions de personnes à manifester dans la rue et un député à cesser de s'alimenter durant quarante jours. On ne nous écoute plus. C'est un drame pour la démocratie française".


En revanche, Noël Mamère critique le geste de Lassalle comme "un constat d'échec. Sa grève en dit long sur les faiblesses, et l'incapacité des politiques face au désordre économique". De surccroit, pour lui comme pour Bayrou, "la grève de la faim de Lassalle est le symptôme montrant notre démocratie est vraiment malade."



Maxime Plaisantin